Le changement climatique a cela de déstabilisant qu’il n’épargne presque aucun secteur d’activité : bien qu’à des degrés extrêmement divers, la responsabilité de son aggravation, tout comme ses conséquences, sont partagées.
Responsable de 25 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) et de près de 90 % de la déforestation mondiale, l’agriculture y contribue très fortement. Mais elle en est aussi victime : la hausse des températures, l’intensification des phénomènes météorologiques dits extrêmes, la pollution des sols et de l’eau ou encore la raréfaction de cette dernière, sont autant de pressions nouvelles s’exerçant sur les systèmes agricoles et alimentaires. Le changement climatique place donc le secteur agricole face à de véritables défis.
De fait, la transition écologique de l’agriculture a été l’un des points d’orgue de la 26e conférence des Nations Unies pour le climat (COP 26), réunie du 1er au 12 novembres à Glasgow. Avec un bilan général mitigé, qui ne permettra pas de contenir le réchauffement climatique sous le seuil critique de 1,5 °C, la COP 26 se conclut cependant avec plusieurs décisions concernant l’agriculture.
Une centaine d’États se sont ainsi accordés sur la nécessité de stopper la déforestation, de passer à des modes d’exploitation plus durables, ou encore de réduire de 30 % les émissions de méthane d’ici 2030. Ce dernier engament a été fortement appuyé par la commission européenne. Et pour cause, si les émissions de méthane ont un effet de réchauffement 82 fois plus important par kilogramme que celui du CO2 sur vingt ans, leur réduction de 45 % dans la décennie contribuerait fortement à contenir le réchauffement en deçà des 2 °C.
La filière de l’élevage a donc du pain sur la planche ! Mais nous ne partons pas de zéro. Outre le fait qu’en France un certain nombre d’éleveurs pratiquent depuis toujours une agriculture paysanne avec un bilan carbone quasiment neutre, ils sont aussi de plus en plus nombreux à engager des démarches certifiantes « bas carbone » (plus de 300 exploitations labellisées) qui signent la transition écologique de leurs fermes tout en maintenant leur productivité. Et en matière de climat comme d’éco-système tout est lié : une ferme qui transitionne ici et privilégie pour l’alimentation des bêtes l’herbe du coin plutôt que le soja cultivé en Amazonie, contribue aussi à lutter contre la déforestation. Les voies de la captation des GES ne sont donc pas si impénétrables !
L’arrêt de la déforestation était un autre objectif fort de la COP 26, avec près de 16,5 milliards d’euros de financement. Mais cet objectif doit rester conciliable avec une production agroalimentaire suffisante pour répondre aux besoins des populations. Aussi, à la #Positive Production nous nous réjouissons de la signature, par l’ensemble des participants, du programme « Action commune de Koronivia pour l’agriculture ». Afin de préserver la souveraineté alimentaire, il porte des actions de lutte contre l’artificialisation des terres, de maintien de l’élevage, ou encore de soutien à l’agropastoralisme. En France, notamment avec l’appui de biosolutions toujours plus efficaces, nombreux sont les agriculteurs et éleveurs déjà engagés dans cette voie vertueuse qui reconnaît le potentiel unique de l’agriculture face au changement climatique.
Reste que la COP 26 n’a pris aucun engagement sur un sujet pourtant essentiel : la biodiversité. Il y a pourtant nécessité de lier la réduction des émissions de GES à la restauration et préservation de l’ensemble des éco-systèmes, d’autant plus que, comme le souligne l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), les objectifs d’atténuation en matière de climat et la préservation de la biodiversité peuvent être concurrents, notamment sur le secteur de l’élevage. Gageons que le ministère de l’Agriculture, qui regrette aussi cette absence, saura y pallier dans la déclinaison nationale des objectifs de la COP 26 et produire des dispositifs efficaces pour accompagner l’ensemble des acteurs.
Les COP se succèdent avec à chaque fois la promesse de faire plus et mieux, tant l’urgence est avérée. Or, les initiatives prises, tous secteurs confondus, demeurent très largement insuffisantes et les émissions de GES continuent à augmenter. Les courbes du GIEC projettent ainsi une augmentation de la température de +,1,5 °C dès 2030, et de 2,5 à 4 °C d’ici la fin du siècle, avec des conséquences particulièrement rudes pour le monde agricole et la production alimentaire. Les engagements doivent s’incarner dans des transitions réelles et ici c’est avant tout la responsabilité des États qui est de mise.
Demeure donc une inconnue : cette nouvelle COP marquera-t-elle ce tournant politique ? Et une certitude : ceux qui nourrissent le monde, dans toute leur diversité, en ont besoin. Tout comme ceux qui mangent.
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